Médiapart et BFM TV viennent de lever le voile sur une affaire datant de novembre 2022 concernant un brigadier de la DGSI. Dès 2009, cet agent, qui a aujourd'hui 52 ans, aurait utilisé à des fins personnelles des fonds alloués pour la rémunération de ses sources, essentielles à ses missions de renseignement.
Au cours de sept années, il est accusé d'avoir détourné au moins 92 000 euros, destinés à financer son activité professionnelle. Ces fonds servaient entre autres à payer des hackers engagés pour pénétrer des réseaux spécifiques, y compris djihadistes. Une source impliquée dans ces opérations a partagé son expérience, révélant l'ampleur du détournement :
« Je touchais de petites sommes allant jusqu’à 2.000 euros. Mais j’ai compris ensuite lors de mon audition par l’inspection générale de la sécurité intérieure (IGSI), la police des polices de la DGSI, qu’il avait gardé une bonne partie de l’argent qui m’était destiné. »
Des ex-collaborateurs du brigadier suggèrent que le montant détourné dépasse le million d'euros provenant de fonds publics, bien que l'enquête n'ait pas réussi à le vérifier à cause des méthodes d'obfuscation (procédé visant à suffisamment transformer un code informatique pour qu’il devienne illisible) employées par l'individu. L'agent avait ouvert un compte bancaire sous une identité fictive grâce à des faux documents d'identité accessibles via son poste à la DGSI, organisme chargé de la cyberdéfense, du contre-terrorisme et de l'espionnage. Ces privilèges lui ont fourni des moyens supplémentaires, facilitant ainsi ses activités frauduleuses.
Le brigadier ne s'est pas contenté de détourner des fonds ; avec l'avènement des crypto-monnaies, il a su les valoriser. Reconnu comme expert dans ce domaine, il investit dans des rigs de minage pour extraire des bitcoins et se lance également dans le trading. Ces activités liées aux crypto-monnaies lui auraient permis d'amasser plus d'un million d'euros. À noter que, durant les premières années du Bitcoin, le minage individuel restait économiquement viable. Pour convertir ses bitcoins en euros, cet homme a voyagé incognito vers un pays d'Europe de l'Est. La découverte de cette fraude revient à la DGSI, grâce à ses contrôles internes, menant à la suspension de l'agent et à sa condamnation en novembre 2022 à trois ans de prison, dont six mois ferme, et à une amende de 1 000 euros, en plus de la saisie d'une voiture et de l'interdiction de travailler comme policier, après près de deux décennies à la DGSI.
Contacté par Médiapart, l’homme, peu bavard, estime que l’affaire a déjà été traitée :
« [Je ne souhaite pas revenir] sur une affaire qui a été définitivement jugée et qui par conséquent est close. […] Par ailleurs, je ne peux ni infirmer ni confirmer vos informations relatives à mes fonctions passées en raison de leurs natures classifiées qui m’interdisent de les évoquer. »
L’affaire est particulièrement embarrassante pour la DGSI, ce qui explique pourquoi elle n’a pas été communiquée, et pourquoi la condamnation a eu lieu discrètement en 2022. Aujourd’hui, l’homme condamné est libre et exercerait le métier d’« entrepreneur individuel ».
Source : Médiapart
Inscrivez-vous gratuitement à la newsletter de Summit Research
et recevez notre newsletter hebdomadaire tous les samedi à 10h (CET)
Nous rendons le monde de la blockchain et des crypto-monnaies accessibles en construisant ensemble un écosystème transparent et compréhensible.